19/08/2020

Vers des villes pour les droits humains en Équateur: Les droits humains comme cadre de transformation dans l'ère post-COVID-19

La réunion « Les villes et territoires après le COVID-19 : réaffirmer la place des droits humains » a eu lieu du 14 au 19 juin, dans le but de promouvoir l’approche des villes pour les droits humains auprès des gouvernements locaux en Équateur. Elle s’est tenue en ligne et a réuni une centaine de gouvernements locaux du pays, dont beaucoup développent déjà des politiques innovantes dans le domaine des droits humains et du droit à la ville. Elle a été co-organisée par la Commission CGLU-CISDPDH avec plusieurs institutions nationales et internationales, parmi lesquelles l'Association des municipalités équatoriennes, le Defensor del Pueblo del Ecuador (Médiateur des droits à l'échelle nationale), l'agence de coopération allemande GIZ et la Plateforme mondiale pour le droit à la ville.


Un processus pionnier qui cherche à positionner les droits humains comme cadre de transformation au niveau local

La réunion a renforcé la discussion autour de la mise en oeuvre de politiques en faveur des droits par les gouvernements locaux équatoriens. Cette rencontre est le fruit d'un processus entamé en 2018, qui a mis en évidence les défis des droits humains auxquels les villes équatoriennes sont confrontés (amélioration des quartiers précaires, accès aux services de base, non-discrimination etc.), ainsi que le lancement d'un travail de coopération basé sur la promotion de l'innovation dans les politiques publiques territoriales. Il convient de mentionner le lien entre ce processus et l'intérêt croissant des villes équatoriennes pour des visions telles que la ville des droits humains ou le droit à la ville - ce dernier ayant été officiellement reconnu dans la Constitution équatorienne en 2008 et largement discuté lors de la conférence d'Habitat III qui s'est tenue à Quito en 2016.

Diverses contributions tout au long de la réunion de juin ont permis de rendre visibles les dernières avancées promues par les municipalités équatoriennes à cet égard. La conseillère de Quito, Gissela Chalá, a partagé le fonctionnement du système local de protection des droits humains mis en place dans la capitale équatorienne, qui accorde une grande importance à la protection des groupes les plus vulnérables et à la promotion d'actions de non-discrimination. Quito a également un Conseil de protection des droits qui regroupe les acteurs gouvernementaux à différents niveaux et entités de la société civile afin de renforcer la coordination entre les acteurs et de promouvoir des actions conjointes.

Le maire de Loja, Jorge Bailón, a partagé l'engagement au long terme de sa ville en faveur des droits humains, visant à renforcer les mécanismes de participation citoyenne et d'accès aux services de base tels que le droit à l'eau ou le droit à un logement décent. Jorge Bailón a également souligné la volonté de la municipalité de Loja de devenir la première ville pour les droits humains en Equateur.

« Au cours des vingt dernières années, de plus en plus de villes dans différentes parties du monde ont proposé le cadre des droits comme une occasion de donner de nouvelles réponses aux besoins des citoyen.ne.s. En Équateur, nous avons la possibilité de définir nos propres mécanismes pour garantir les droits humains à l'échelle locale, transformant ainsi nos agendas territoriaux pour donner la priorité aux actions en faveur de l’égalité, la participation et la transparence, et créer des institutions plus inclusives »

Freddy Carrión, Médiateur de l’Équateur 

Cherchant à s’adapter aux différentes réalités et spécificités des municipalités équatoriennes, l'événement s’est déroulé à travers des sessions axées sur des domaines précis : du droit aux services publics à domicile à la non-discrimination en passant par la consolidation de la paix et l’approche transversale des droits humains. L'événement a permis d’identifier des méthodologies concrètes et adaptables par lesquelles tout gouvernement local, indépendamment de sa taille ou de ses capacités, pourrait intégrer l'approche fondée sur les droits dans son action quotidienne, ainsi que tirer parti du mouvement des villes pour les droits de humains pour promouvoir des nouvelles transformations structurelles en faveur de villes plus égalitaires, plus inclusives et durables. 

Apporter des expériences internationales au débat

Plusieurs gouvernements locaux et partenaires de la CGLU-CISDPDH ont été invités à participer à la réunion, afin d'apporter des perspectives et des expériences internationales au processus entamé. Barcelone, Mexico et Bogotá ont partagé leurs politiques en matière de droits humains: la première s’est axée sur l'intégration de l'approche fondée sur les droits dans l'action publique municipale et la promotion de mécanismes locaux de non-discrimination; la deuxième a mis l'accent sur les actions visant à promouvoir la paix et à prévenir la violence urbaine en développant des initiatives d’inclusion sociale novatrices; et la troisième s’est orientée vers la réactivation économique, accordant une attention particulière aux réalités des groupes prioritaires. La Coalition LAC a également montré comment une expérience de coopération entre quatre villes d'Amérique latine a permis l'élaboration de plans d'action locaux contre la discrimination.



Les autres participants ont également souligné la contribution de l'action communautaire dans la construction de villes des droits humains. Barcelone a développé une forte expérience de collaboration avec les entités locales des droits humains; au niveau des acteurs sociaux, la participation de Giuseppe Micciarelli du mouvement des communs à Naples a relevé les opportunités posées par le concept des communs urbains, mettant en évidence son potentiel pour promouvoir des processus d'amélioration des quartiers précaires ou la création de services de soins avec une fonction sociale. Enfin, la participation citoyenne est liée à de nombreux autres aspects du développement territorial: sur le plan économique, la participation du GSEF (Forum mondial de l'économie sociale) a permis d'entrevoir le potentiel de l'économie sociale et solidaire pour promouvoir des villes plus justes et plus inclusives à travers de nouveaux cadres à partir desquels repenser l'activité économique; tandis que les représentantes de Cities Alliance et du projet COiNVITE ont souligné le potentiel des approches participatives dans les processus d'amélioration des quartiers précaires et d'accès à un logement décent.

Un cadre de transformation pour l'ère post-COVID-19

Bien que la réunion de juin ait été consacrée à la promotion des droits humains et du droit à la ville dans les agendas territoriaux des municipalités équatoriennes, elle a également permis de mutualiser les premières réponses qui émergent dans leur gestion de la crise en COVID-19, ainsi que les priorités locales pour l'avenir. Ainsi, elle a offert une plateforme pour repenser la période postérieure à la pandémie à partir d'approches fondées sur les droits. Des domaines tels que la mobilité durable ou la réactivation économique ont été largement débattus, témoignant de la prise de conscience et de la volonté d'innover des pouvoirs locaux équatoriens. Des municipalités comme Cuenca ou Esmeraldas ont partagé des initiatives lancées récemment, comme le renforcement des systèmes de pistes cyclables urbaines ou la promotion de nouvelles formes de commercialisation de la production agricole locale. La lutte contre la violence à l'égard des femmes a également été identifiée comme une priorité tant dans le contexte actuel que dans l’après-pandémie.