Du 7 au 12 novembre, la CISDPDH a participé à la 18ème édition de Femmes du Monde en Seine Saint Denis, une rencontre unique qui s'est tenue dans le département de Seine Saint Denis - co-président de la Commission - réunissant les collectivités locales, la société civile, les professionnels et les partenaires clés pour échanger sur les violences faites aux femmes.
L'édition de cette année était très importante car elle marquait le 20ème anniversaire de l'Observatoire des violences faites aux femmes, une institution clé - fondée par Mme Ernestine Ronai, actuellement à sa tête - qui a permis de sensibiliser, de collecter des données et d’établir des statistiques sur les violences faites aux femmes au niveau local en Seine Saint Denis. Par son travail incessant, l'Observatoire a ouvert plusieurs pistes de coopération avec les acteurs de la société civile, les associations locales et les médias, avec la justice et les systèmes de santé ; mais aussi avec la police et les secteurs de l’éducation et de la culture du Département. Grâce à sa grande capacité à créer des synergies et à impliquer des partenaires dans cette lutte, l'Observatoire agit comme un catalyseur pour la conception et la mise en œuvre de politiques et de disposifs locaux visant à prévenir la violence à l'égard des femmes, ainsi qu'à protéger les victimes et à renforcer leur autonomie par le biais d'un soutien psychologique et juridique, mais aussi à travers l’accès au logement et la réinsertion socio-économique.
Le premier temps fort de la semaine a été représenté par la célébration de l'anniversaire de l’Observatorie le 10 novembre, qui a rassemblé des représentants locaux, tous les partenaires (y compris le secrétariat exécutif de la CISDPDH), les délégations internationales de Ngadzdija et Djénine, ainsi que des acteurs nationaux du système judiciaire et du Ministère de l'Egalité entre les femmes et les hommes. Lors de son discours d'ouverture, M. Stéphane Troussel, Président du Département de la Seine Saint Denis, a souligné comment le travail de l'Observatoire a permis aux collectivités territoriales de participer activement à la lutte contre les violences envers les femmes et a invité les autres villes et territoires à suivre le même trajet et à renforcer la coopération et la solidarité internationale autour de cette lutte. Mme Isabelle Lonvis-Rome, Ministre française de l'Egalité entre les femmes et les hommes, a rappelé l'importance et l'efficacité des outils et des politiques locales conçus par l'Observatoire, tels que le « Téléphone grave danger » ou le protocole « Féminicide », qui ont également été adoptés au niveau national.
Les autres partenaires ont discuté des méthodologies de diagnostique pour évaluer les violences faites aux femmes au niveau local et de la nécessité de formations spécifiques pour renforcer la capacité des différents acteurs locaux afin de garantir que les femmes soient protégées dès qu'elles se révèlent être victimes de violence. Les participants ont également échangé sur les dispositifs de prévention adressés aux jeunes, sur l'importance de l'art et du théâtre soit pour la prévention soit pour le rétablissement, ainsi que sur les mesures pour les enfant.e.s, qui sont souvent "co-victimes" de la violence à l'égard des femmes.
Un autre temps fort de la semaine a été représenté par la présentation du travail mené par les territoires pilotes de Ngadzdija et de Djénine tout au long de la première année de mise en œuvre du programme international « Pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violence » qui a consisté en un « diagnostic partagé » multiparti sur l’état de lieu sur les violences faites aux femmes au niveau local. Cet exercice complexe a permis aux deux territoires de formuler des recommandations et d’indiquer des domaines d’intervention pour les années à venir, ainsi qu’à sensibiliser les populations au caractère universel de la violence à l'égard des femmes, indépendamment des différents contextes sociopolitiques locaux et des cadres juridiques.
Ngadzdija a identifié des actions spécifiques nécessaires en termes de formation, notamment à l'intention des soignants, mais aussi en matière de prévention pour sensibiliser davantage à l'éducation sexuelle et à la violence à l'égard des femmes à travers le soutien des infirmières scolaires, ainsi que parmi les "cadi", les autorités locales chargées des mariages. Ngadzdija a également esquissé des initiatives et des campagnes de protection et de plaidoyer, notamment pour accélérer les protocoles de santé pour la prise en change des femmes et des filles victimes de violence ; mais également avec le but de prévenir les mariages précoces et forcés ou pour garantir un "avortement thérapeutique" aux victimes de violences sexuelles.
La ville de Djénine a préparé une description détaillée du cadre juridique des Territoires palestiniens par rapport aux droits des femmes - surtout si l'on considère que le droit civil n'est pas unifié entre la Cisjordanie, la bande de Gaza et Jérusalem-Est - et a souligné les difficultés à renforcer les droits des femmes dans une zone de conflit en raison de l'occupation israélienne. La ville a également mis en évidence le rôle clé des mouvements féministes dans la promotion des droits des femmes et a mené une analyse précise sur la question de savoir si et comment les différentes formes de violence sont reconnues et institutionnalisées par les autorités locales, notamment la cyber-violence, la violence économique et psychologique ou la violence sexuelle, avec un accent particulier sur le viol, le féminicide et les « crimes d'honneur ».
La semaine de Femme du Monde 2022 comprenait également des visites de terrain avec des acteurs locaux travaillant sur différents aspects des violences faites aux les femmes. Les participants ont rencontré le centre d'accueil de jour Pow'her pour la prise en charge des jeunes femmes âgées de 15 à 25 ans victimes de violences sexistes et sexuelles ; ainsi que les professionnels travaillant dans l'Unité de soutien spécialisée en psychotraumatisme ; qui soutient les femmes victimes grâce à des méthodologies spécifiques pour répondre à leurs besoins de santé mentale et pour assurer leur suivi psychologique. Enfin, le Collectif Féministe Contre le Viol a partagé ses activités d'écoute et d'accompagnement des victimes de viol pour évaluer les besoins et l'impact de la violence, ce qui implique également de se concentrer sur la « stratégie de l'agresseur » pour rendre visibles les différentes formes de violence dès le début afin d'éviter leur accélération, leur accumulation et prévenir leurs conséquences tragiques. Tous ces acteurs locaux travaillent en étroite collaboration avec l'Observatoire de Seine Saint Denis - qui contribue à la collecte et à la diffusion de leurs données - et souvent leurs activités ont été établies et consolidées sous l'impulsion de l’Observatoire lui-même, ce qui a généré un « effet d'entraînement » des bonnes pratiques pour protéger les femmes victimes de violence dans l’ensemble du Département.
La semaine a également inclus des réunions avec des associations de Seine Saint Denis ; ainsi qu'une rencontre avec le Maire et les citoyens de La Courneuve pour les sensibiliser aux droits des femmes en Palestine.
La 18ème édition de Femmes du Monde en Seine Saint Denis s'est conclue par la réunion du Comité de pilotage du programme international - à laquelle ont participé des représentants du Département de Seine Saint Denis, de Ngadzdija et de Djénine et de la CISDPDH - au cours de laquelle les participants ont partagé les résultats de la première année du programme et échangé sur l'agenda 2023. La Commission a partagé les résultats du webinaire sur le féminicide et les violences dans le cadre conjugal; des informations sur la prochaine formation Iztapalapa; ainsi que le grand impact des actions de plaidoyer au niveau de l'ONU mené dans le cadre de CGLU pour ouvrir le débat sur le rôle des gouvernements locaux et régionaux dans la lutte contre la violence envers les femmes dans l'arène internationale.
Beaucoup plus à venir pour 2023 !