Le 1er Sommet des villes des Amériques, organisée à Denver en avril 2023, a posé un nouveau jalon dans notre plaidoyer pour la localisation de l'agenda du logement avec une approche bienveillante pour toutes les personnes. L'occasion a été donnée d'ouvrir pour la première fois un dialogue régional dans ce domaine, grâce à la session "Villes pour un logement convenable : unir les forces vers des systèmes de logement locaux qui prennent soin de toutes les personnes”.
La session était dirigée par Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU), la Fédération latino-américaine des villes, municipalités et associations (FLACMA) et notre Commission pour l'inclusion sociale, la démocratie participative et les droits humains (CISDPDH). La session était également présidée par Leilani Farha, directrice mondiale de The Shift et ex-rapporteur de l'ONU sur le logement adéquat, et par Carolina Cosse, maire de Montevideo et présidente de CGLU. Des maires de la région ont également participé à la conférence, notamment Victoria Woodards, présidente de la National Leagues of Cities et maire de Tacoma, Mitch Roth, maire d'Hawaï, Berry Vrbanovic, maire de Kitchener, et Charlie Clark, maire de Saskatoon.
Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires - Article 25 de la Déclaration universelle des droits humaines.
Cette année marque le 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits humains. Il est donc utile de faire une pause pour se rappeler que "le logement est un droit humain que toutes les formes de gouvernement doivent soutenir", comme l'a souligné Emilia Saiz, secrétaire générale de CGLU.
Bien qu'il s'agisse d'un droit de humaine, "le logement est devenu l'un des principaux moteurs de l'économie et des inégalités dans nos villes. Nous sommes témoins de l'invasion de ce secteur par les acteurs financiers", a déclaré Leilani Farha. Le financement de ce qui devrait être un droit humain se cache derrière la crise et l'urgence du logement, dont souffrent malheureusement des milliards de personnes dans le monde.
Actuellement, 1,6 milliard de personnes vivent dans des logements inadéquats (ONU, 2017), soit près d'un septième de la population mondiale. Une personne sur huit vit dans des établissements informels (ONU, 2021) et quelque 150 millions de personnes vivent dans des conditions de sans-abrisme, sans accès à l'eau ou à l'assainissement, selon The Shift. Dans ce contexte, Charlie Clark, maire de Saskatoon, au Canada, a posé la question suivante : comment faire en sorte que les gens pensent à l'urgence du logement avec la même urgence que l'urgence climatique ?
Pour faire face à ce modèle de logement néolibéral, "un nouveau pacte social basé sur l'attention et le féminisme, qui promeut des sociétés plus justes, plus attentives et plus égalitaires" est nécessaire, comme l'a souligné la présidente de CGLU, Carolina Cosse. Elle a rappelé qu'à CGLU, nous sommes guidés par la conviction de construire des systèmes de logement capables de prendre soin de toutes les personnes qui vivent dans nos villes.
Nous avons rejoint cette lutte depuis la Commission, où "nous travaillons pour faire avancer le droit à un logement adéquat, non seulement en tant que loi internationale, mais aussi en tant qu'outil pour créer de meilleures politiques", a expliqué notre coordinatrice Amanda Fléty.
Il est urgent de localiser l'agenda du logement pour un modèle qui prenne en compte toutes les personnes, en particulier parce que "ce que les villes peuvent apporter au débat international, ce ne sont pas seulement les réalités locales, mais aussi les innovations locales", comme l'a défini notre coordinatrice.
Carolina Cosse a parlé des politiques publiques menées à Montevideo (Uruguay) pour aider les coopératives locales à financer et à construire des logements convenables. Le maire a fait remarquer que cet effort a été possible grâce à la coopération de plusieurs parties prenantes et à la gouvernance à plusieurs niveaux.
En effet, une approche à l'échelle communautaire, en partenariat avec le gouvernement national et les municipalités canadiennes, a contribué à faire progresser le droit à un logement convenable, comme l'a raconté Berry Vrbanovic, maire de Kitchener (Canada). Comme il le sait, "aucun problème ne peut être résolu par un seul acteur ou un seul niveau de gouvernement.
Dans le partenariat avec les acteurs, il est essentiel d'accorder une attention particulière aux groupes historiquement marginalisés, tels que les communautés indigènes qui, à Saskatoon (Canada), représentent 80 % de la population sans-abri. Face à ces injustices structurelles, le maire de Saskatoon, Charlie Clark, a invité les participants à imaginer ce que seraient leurs villes respectives si personne n'était sans-abri :
"Le fait de savoir qu'il y a des personnes sans-abri nous affecte tous inévitablement, sans que nous nous en rendions compte, cela nous fait beaucoup de peine à l'intérieur parce que nous savons que ce n'est pas juste. Imaginez tout ce que nous pourrions faire si nous pouvions agir avec la légèreté de savoir que tout le monde a un vrai foyer".
Le maire de Saskatoon a insisté sur la nécessité de travailler directement avec ces communautés pour trouver des solutions qui leur conviennent.
Comme le résume Victoria Woodards, maire de Tacoma (États-Unis), "Investissez dans les gens, créez des partenariats, et vous aurez des possibilités infinies". Dans cette ville de l'État de Washington, on a opté pour une stratégie de logement abordable assortie d'un plan décennal, tout en considérant qu'il est crucial de maintenir les logements existants en bon état.
L'adoption d'une approche globale et à long terme en matière de logement est sans aucun doute l'un des piliers essentiels de la lutte contre la crise actuelle. Comme l'a déclaré Mitch Roth, maire d'Hawaï (États-Unis) :
"La durabilité signifie que nous devons pouvoir élever nos enfants sur notre île. Et ils doivent pouvoir élever leurs enfants sur notre île. Et cela n'arrivera pas si nous n'avons pas de logements abordables".
Ce représentant local nous a invités à considérer la garantie de l'accès à un logement adéquat pour tous comme "un prisme à travers lequel regarder les autres défis de la société et les politiques qui sont définies pour y répondre".
Suite à ce dialogue régional ouvert lors du Sommet des villes, la Communauté de pratique sur le logement de CGLU continuera à travailler avec d'autres étapes à l'horizon, y compris une réunion de travail virtuelle qui se tiendra le 24 mai. L'objectif est de continuer à faire avancer une stratégie commune pour contribuer, à partir du niveau international, à faire progresser le droit au logement au niveau local.