16/07/2015

Poitou-Charentes (France): démocratisation de l'action publique grâce à la participation citoyenne

 

 

 

La politique participative de la Région Poitou-Charentes a vu le jour fin 2004 avec l’arrivée au pouvoir de Ségolène Royal, et n’a cessé d’évoluer et de se développer depuis. Touchant potentiellement tous les usagers des services publics régionaux, elle vise à faire participer le public aux décisions régionales. Elle s’est tout d’abord concentrée sur les lycées et ses usagers, via le budget participatif des lycées, avant d’être progressivement étendue, via le recours au tirage au sort, à d’autres politiques publiques, tels les transports, l’environnement ou l’économie. Cette politique a connu une évolution récente importante, avec la mise en place de critères de justice sociale – définis par les usagers eux-mêmes, via un processus participatif – visant à accroître le caractère redistributif de ces politiques.

Au-delà de la promotion de la justice sociale et la redistribution des richesses en direction des groupes sociaux ou des territoires les plus désavantagés, cette politique vise des objectifs politiques, civiques et administratifs. Il s’agit tout d’abord de démocratiser l’action publique régionale, et notamment la politique éducative – une des compétences centrales de la Région étant la gestion des lycées – en incluant de façon accrue dans la définition des objectifs et le choix des priorités budgétaires. La politique participative de Poitou-Charentes constitue également un espace d’apprentissage de la citoyenneté et d’éducation à la chose publique, l’objectif étant de développer le civisme par la participation, en se concentrant notamment sur les jeunes. Enfin, cette politique cherche à moderniser l’administration régionale, en renforçant la transversalité entre services et en accélérant le rythme des décisions publiques afin de répondre plus rapidement aux besoins de la population.

Par définition, cette politique participative place au cœur de son fonctionnement la participation des usagers. L’idée au cœur de cette démarche, est que la recherche d’objectifs sociaux et politiques, et notamment la réduction des inégalités, ne peut se faire sans la participation directe du public, afin qu’il exprime ses besoins et ses attentes, et puisse éventuellement connaître un processus d’empowerment. Cette démarche, portée par l’administration régionale n’est pas institutionnalisée d’un point de vue légal, les Régions françaises ne disposant pas de pouvoir législatif. Cependant, on peut constater une institutionnalisation de fait, les politiques mises en place connaissant un processus de routinisation et d’enracinement dans la culture politique régionale. La politique participative de la Région est principalement financée par la Région, pour un coût relativement modeste, qui se résume principalement en l’emploi de quelques agents territoriaux en charge de l’organisation de la participation. Certains projets ont cependant reçu le soutien financier de l’Union Européenne.

La politique participative s’est effectivement traduite par une démocratisation de l’action régionale, notamment pour la politique éducative. Un des résultats les plus importants de cette expérience concerne également la modernisation de l’administration régionale. D’un point de vue social, les résultats sont plus contrastés. Si cette politique a effectivement permis une réorientation des ressources vers les acteurs les moins influents dans le processus décisionnel régional jusqu’alors (notamment les jeunes et les classes populaires), certains effets anti-redistributifs ont pu être constatés (certains acteurs ou territoires parvenant à capter des ressources via les processus participatifs, alors qu’ils sont dans une situation relativement favorisée). Cependant, la mise en place récente de critères de justice sociale dans le cadre du budget participatif des lycées devrait en partie répondre à ce problème.

La politique participative de la Région Poitou-Charentes est confrontée à deux obstacles plus profonds. Tout d’abord, les réticences, voire la résistance des techniciens, remise en cause de leur identité professionnelle, tout comme celles des proviseurs de lycées et des syndicats ayant le sentiment de perdre du pouvoir suite à la création de dispositifs participatifs. Dès lors, seule une forte volonté politique est à même d’assurer l’avancée d’une politique participative efficace. Ensuite, le processus s’avère extrêmement lourd à porter d’un point de vue administratif, demandant une forte mobilisation du personnel régional, ce qui a évidemment un coût. 

Pour accéder à l'étude de cas complète : Étude complète

Pour plus d'information : Observatoire Villes Inclusives