05/12/2024

Plus de 50 dirigeant.e.s locaux/ales et expert.e.s se réunissent en Seine-Saint-Denis pour souligner le rôle des gouvernements locaux et régionaux dans la lutte contre la violence envers les femmes

Un espace global pour renforcer le leadership local et la So So So Solidarité

Plus de 50 dirigeant.e.s locaux/ales et expert.e.s se sont réuni.e.s en Seine-Saint-Denis, France, pour mettre en avant le rôle crucial des gouvernements locaux et régionaux dans l’élimination des violences envers les femmes, à l’occasion du séminaire final du programme international de trois ans « Pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violences ». Ce programme s’appuie sur 20 ans d’expérience de l’Observatoire des violences envers les femmes (OVF) du Département de la Seine-Saint-Denis et de Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU) à travers notre Commission. Il a été financé par l’Agence Française de Développement (AFD).

Pendant trois jours, les participant.e.s ont réfléchi aux enseignements des trois dernières années, partagé des outils locaux efficaces et exploré des stratégies pour construire des partenariats axés sur les droits humains. Les discussions ont mis en avant le rôle essentiel des gouvernements locaux et régionaux dans l’autonomisation des femmes et la promotion de nouvelles générations de dirigeantes locales, ainsi que l’importance de la solidarité avec toutes les femmes du monde.

En outre, cet événement a permis de tracer des perspectives pour Beijing +30 et la CSW69, grâce à la collaboration entre CGLU et le programme WYDE « Initiative de Leadership des Femmes », financé par l’Union Européenne et réalisé en partenariat avec ONU Femmes, IDEA International et l’Union Interparlementaire (UIP).

Jour 1 : 20ᵉ Rencontre Femmes Monde en Seine-Saint-Denis

La journée a débuté avec la « 20ᵉ Rencontre Femmes du Monde en Seine-Saint-Denis » à la MC93 - Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis à Bobigny. Stéphane Troussel, Président du Département de la Seine-Saint-Denis, a souligné que l’Observatoire international des violences envers les femmes (OIVF) est un espace clé pour l’action efficace. « Nous devons toutes et tous faire plus pour protéger les femmes », a-t-il déclaré.

S’en est suivie une discussion sur les féminicides avec Yadira Cortés Castillo, Spécialiste en Soutien Psychosocial de la Red Mesa de Mujeres de Ciudad Juárez, qui a dénoncé les près de 3 000 féminicides enregistrés en 30 ans dans son territoire. Lidia Rodríguez Chávez, Directrice de l’Inclusion et du Bien-Être Social à la mairie d’Iztapalapa, a présenté la stratégie « Siempre Vivas », qui repose sur le lien direct avec les communautés pour garantir des espaces publics sûrs.

Pendant cette discussion, le personnel de l’OVF et du Département de la Seine-Saint-Denis a également partagé des stratégies et des innovations pour faire face aux féminicides, notamment l’établissement d’une ligne directe et l’utilisation de données ventilées par genre.

Notre coordinatrice Amanda Fléty et Maïra Topall, coordinatrice de l’OIVF, ont ensuite présenté le réseau international de plus de 50 dirigeantes locales et expertes, intitulé « Pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violences ». Par ailleurs, Mayssoun Dawoud, Responsable de l’OVF à Jénine (Palestine), a illustré comment, grâce au soutien de l’AFD, cette initiative a permis d’autonomiser les femmes et leurs enfants, même en temps de guerre, grâce à des services publics centrés sur le soin et des opportunités économiques.

Lors de la Plénière  sur « Violences sexuelles », Reem Alsalem, Rapporteure Spéciale des Nations Unies sur la violence contre les femmes, a appelé à mettre en place des réseaux de soutien entre les femmes et les mouvements de base, et à les intégrer dans toutes les politiques publiques les concernant. Rohey Malick Lowe, Maire de Banjul, a souligné la solidarité et l’action locale comme des éléments clés pour autonomiser les femmes et lutter contre la violence.

Pour clore la journée, Pascale Labbé, Vice-Présidente du Conseil Départemental de Seine-Saint-Denis, a remercié les dirigeantes locales et les expertes présentes, notre Commission et CGLU pour avoir renforcé la perspective internationale de l’OIVF. Ernestine Ronai et Emilia Saiz, Secrétaire Générale de CGLU, ont proclamé la Charte des Valeurs « Pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violences ». « Grâce à ce programme international, nous avons pu changer un peu le monde, et c’est précisément le but de ce document », a conclu Emilia Saiz.

Cliquez ici pour lire la Charte des Valeurs « Pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violences »

La journée a été rythmée par des performances culturelles dirigées par des femmes et des groupes féministes et anti-patriarcaux. Le chœur du Département de la Seine-Saint-Denis a interprété « Canción sin Miedo » et un chant contre les mutilations sexuelles féminines. Les mariachis Las Arrieras ont présenté des versions féministes de classiques du genre, tandis que LOBA, un groupe de percussion traditionnelle congolaise, a animé les participant.e.s. Une performance de hip-hop par le groupe Time Room Lockers a clôturé cette journée inspirante.

Jour 2 : Focus sur le programme international « Territoires protecteurs des femmes victimes de violences » et l’importance des réseaux comme REFELA et Mercociudades

La deuxième journée a commencé avec la Session plénière « l’état des violences faites aux femmes dans le monde, perspective locale et internationale » au Canal 93 à Bobigny. Abdel Sadi, Maire de Bobigny, a accueilli les participant.e.s. Il était accompagné par Pascale Labbé, qui a rappelé les apprentissages tirés des formations du programme international organisées à Iztapalapa et à Banjul. Reem Alsalem a prononcé les mots d’ouverture, appelant tous les acteurs à éradiquer toutes les formes de violence envers les femmes, avec la création d’observatoires comme pilier stratégique.

Le programme international a ensuite été mis en lumière. Ernestine Ronai a expliqué que « ce travail immense a permis de placer les violences faites aux femmes au cœur de nos projets de coopération dans notre département ». Emilia Saiz a rappelé que « l'égalité a toujours été à l'ordre du jour de CGLU, qui a pris forme lorsque l'Association suédoise des gouvernements locaux et régionaux a mis à l'ordre du jour la nécessité d'inclure les femmes dans la prise de décision locale ». Le secrétaire général de CGLU a réaffirmé que « si nous avons plus de femmes dans la prise de décision, les institutions, les politiques publiques et la conversation peuvent être changées » et a réfléchi au réseau que nous devons créer : « c'est CGLU, et comment pouvons-nous atteindre toutes les personnes ? Nous devons commencer par le groupe de ceux qui sont prêts, et c'est la CISDPDH ».

Lors de l’échange sur les priorités thématiques, Valérie Driot, Responsable de l’Internationalisation Territoriale de l’AFD, a réitéré l’engagement de son organisation à soutenir des projets locaux favorisant l’égalité et les biens communs. Rohey Lowe, qui a accueilli l'une des formations dans sa ville, Banjul, en janvier 2024, a de nouveau invité à utiliser « la recette de la solidarité, parce que nous avons une voix et qu'elle est très forte, et c'est pourquoi nous disons que tous les efforts doivent être locaux ».

Maïra Topall a présenté les fiches thématiques, un outil d’apprentissage du programme international, disponibles en espagnol, anglais, français et arabe. Scannez les codes QR ci-dessous pour y accéder !


Dans le cadre de ces échanges, Paola Pabón, Préfète de Pichincha, a partagé que, grâce à sa réélection, sa région travaille depuis cinq ans sur une politique de soin mettant les femmes autochtones au centre des actions, en raison de leur grande représentation dans le pays. Elle a également invité les gouvernements locaux à reconnaître leur rôle en tant que partie intégrante de l’État, avec la responsabilité de protéger les femmes, les enfants et les générations futures. Mahamat Ardjoune, Responsable de Communication sur les Violences Faites aux Femmes de REFELA-Tchad, a quant à elle partagé les efforts déployés pour sensibiliser les jeunes femmes sur les conséquences des violences, en collaboration avec des associations féminines locales.

La Session plénière sur « les collectivités territoriales écoutent les femmes au niveau local : adresser les féminicides ; penser l’action publique contre les violences conjugales et renforcer les services publics pour la protection des femmes » a été modérée par Maéva Bonnet de l’OIVF et Benedetta Cosco, Responsable Politique de notre Commission.

Dans l’axe « Féminicides », Renée Jeftha, Développeuse de Politiques Sociales pour le Programme d’Autonomisation des Victimes au Western Cape (Afrique du Sud), et Lydia Cordero Cabrera, Conseillère de l’Institut Municipal pour les Femmes de Ciudad Juárez, ont insisté sur l’importance de l’approche sociétale intégrée et des partenariats avec la société civile pour impulser des institutions dédiées à cette thématique.

Pour « Violences conjugales », Kiné Fall, Deuxième Secrétaire Élue du Conseil Départemental de Ziguinchor, Rose Bouzaid, Experte WILDAF Mali, et Tamyris Elpidio, Coordinatrice de l’Unité Thématique Genre de Mercociudades (Niterói, Brésil), ont partagé comment leurs territoires mettent en place des accompagnements juridiques, médicaux et psychologiques 24 heures sur 24, pour les femmes victimes et leurs enfants.

Pour l’axe « Services publics pour la protection des femmes », Verónica Sánchez, Maire de Pedro Moncayo et Conseillère Provinciale de Pichincha, et Folashade Olabanji-Oba, Présidente Nationale d’ALGOVC et Vice-Présidente d’Ikorodu, État de Lagos, ont expliqué comment, dans leurs territoires, elles ont ouvert des centres d’accueil offrant des formations et des opportunités économiques aux femmes. Elles ont également souligné le rôle essentiel du soutien de la police pour assurer la protection des femmes. Verónica Sánchez a partagé sa propre expérience en tant que victime de violence politique et a encouragé les participantes à toujours rester unies : « Une femme peut changer un canton, mais unies, nous pouvons changer la société. »

La deuxième journée a également été marquée par des discussions approfondies sur les outils locaux nécessaires pour protéger les femmes et garantir leurs droits. Parmi les moments phares, la Consultation sur la création d'observatoires locaux facilitée par la Rapporteuse sur les violences faites aux femmes de l’ONU, Reem Alsalem a permis de mettre en lumière leur rôle stratégique et pluridisciplinaire dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Les participantes ont échangé sur les bonnes pratiques et les obstacles liés à la collecte de données fiables. Myriam Abdallah, Responsable de l'Observatoire des violences faites aux femmes de Ngazidja (Comores) a illustré comment de tels dispositifs peuvent non seulement renforcer les politiques publiques locales, mais aussi orienter les actions des territoires partenaires en s’appuyant sur une connaissance précise des réalités locales.

La journée s’est achevée avec une session coorganisée dans le cadre du projet WYDE, intitulée « Territoires protecteurs : Autonomiser les femmes en politique locale : Changer les normes, mettre fin à la violence ». Le premier panel a été modéré par Emilia Saiz, qui a mis en lumière le rôle du programme WYDE pour encourager le dialogue sur les luttes et les obstacles auxquels les gouvernements locaux sont confrontés dans leurs efforts pour autonomiser les femmes.

À cet égard, Carola Gunnarsson, Conseillère de Sala, Envoyée Spéciale de CGLU pour la Liberté, la Solidarité et la Lutte contre les Violences envers les Leaders Politiques Locaux, et Vice-Présidente de CGLU pour l’Europe, a attiré l’attention sur l’augmentation de la violence en ligne et physique qui nuit aux droits des femmes à participer à la vie démocratique et politique. Oriane Filhol, Adjointe au Maire de Saint-Denis et Conseillère Départementale de Seine-Saint-Denis, a raconté comment elle a reçu de nombreuses menaces suite aux campagnes de sensibilisation menées, appelant à la mise en œuvre de mécanismes pour arrêter cette spirale.

Face à ces défis, Hawa Sidibé, Première Vice-Présidente de la Région de Nouakchott, a souligné l’importance de REFELA et du quota de 20 % de femmes dans les assemblées de son pays comme clé pour décider de leur avenir. Dans le même esprit, Fabiana Goyeneche, Directrice des Relations Internationales de Montevideo, a revendiqué le Mouvement Municipal Féministe et sa force collective pour autonomiser d’autres femmes et les amener à occuper des espaces de leadership politique.

Le deuxième panel a été modéré par Cécile Roth, point focal genre de CGLU, qui a partagé que, grâce au programme WYDE, la question des normes sociales a pu être abordée collectivement. Hélène Bidard, Adjointe à la Maire de Paris chargée de l’Égalité de femmes-hommes, de la Jeunesse et de l’Éducation Populaire, a souligné comment les violences politiques, qu’il s’agisse de discrédit ou de menaces, sont amplifiées par une polarisation extrême. Mamou Bamba Diabaté, Maire de Pelengana et Présidente de REFELA-Mali, et Fatimata Sao, Conseillère Municipale de Tevrag Zeina, Nouakchott, ont réaffirmé l’importance des réseaux internationaux de femmes pour l’autonomisation.

Enfin, Marylin Neven, Responsable des Relations avec l’Union Européenne d’IDEA International, a reconnu les défis et a expliqué que le programme WYDE vise à transformer les normes sociales et les inégalités afin d’autonomiser les femmes à participer pleinement.

Jour 3 : Focus sur les outils et les politiques publiques locales, vers Beijing+30

La troisième et dernière journée a débuté avec trois dialogues territoriaux sur la mis en œuvre des territoires protecteurs des femmes victimes de violences à travers le monde. Le Dialogue 1, impliquant Maysoun Dawoud et Lina Zuher de l’Observatoire de Jénine, portait sur la formation des professionnel.le.s dans les gouvernements locaux pour protéger et autonomiser les femmes, même en temps de guerre.

Le Dialogue 2, intitulé « Protéger les Femmes dans des centres d’accueil », a vu la participation d’Amparo Sayago, Directrice des Relations Internationales de Quilmes ; Lorena Chagas Lemos, Sous-Secrétaire des Droits Humains et de la Citoyenneté de Contagem ; Nelly Ouassenan, Adjointe au Maire de Cocody ; et Laureen Genthon, Adjointe au Maire de Nanterre déléguée aux droits des femmes. Les participant.e.s ont partagé leurs expériences dans la création et la gestion de centres d’accueil pour femmes victimes de violences, en mettant en avant des approches basées sur les droits humains, ainsi que des services juridiques, médicaux et psychologiques pour les victimes et leurs enfants.

Le Dialogue 3, « Une culture de partenariat avec les associations et les habitant.e.s », a été animé par Lidia Rodríguez Chávez de la mairie d’Iztapalapa et Zahra Amarine, Chargée de Projets à l’Association Migration et Développement (Maroc). Elles ont démontré comment la collaboration avec la société civile est essentielle pour intégrer la perspective de genre dans les politiques publiques locales.

Ensuite, Viviana Herrera, Responsable de Communication de CGLU, et Maéva Bonnet, de l’OIVF de Seine-Saint-Denis, ont présenté le cours en ligne intitulé « Pour des Territoires Protecteurs des Femmes Victimes de Violence », une première ressource numérique destinée aux gouvernements locaux, leurs équipes et toute personne souhaitant lutter contre la violence à l’échelle locale. Ce cours a été développé par la Commission, l’OIVF et l’unité d’apprentissage de CGLU.

Cliquez ici pour accéder au cours en ligne

La dernière journée s'est également concentrée sur les échanges entre les territoires et la société civile. La session intitulée "Les violences faites ici et là-bas : dialogue avec les associations de Seine-Saint-Denis" a permis de mettre avant plusieurs initiatives menées par des associations locales et internationales pour lutter contre les violences faites aux femmes. Lors de cette session, les lauréat.es de l'Appel à Agir en Seine-Saint-Denis ont présenté leurs projets de solidarité internationale dans le cadre du programme FICOL. Les actions menées par ces associations ont permis d’illustrer une variété d'outils et de moyens de prévention et de protection. Parmi les exemples, on trouve des ateliers d'éloquence organisés avec les jeunes pour encourager la déconstruction des stéréotypes de sexes, la création d'un centre d'hébergement pour les femmes victimes de violences, ainsi que des actions de sensibilisation sur les violences économiques. Ces projets illustrent la mobilisation locale en Seine-Saint-Denis et au-delà, dans une démarche de protection des femmes et des filles victimes de violences issues des diasporas de Seine-Saint-Denis et de sensibilisation des communautés

Enfin, Emilia Saiz a ouvert un débat puissant intitulé « Vers Beijing +30 : Bilan, défis et perspectives pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violences ». Les dirigeantes locales et expertes ont partagé des messages clés et exploré les étapes suivantes pour préparer ce jalon important.

Ernestine Ronai a rappelé son expérience à la IVe Conférence Mondiale sur les Femmes à Beijing en 1995, où les villes avaient déjà demandé des ressources financières nécessaires pour mettre en œuvre des politiques publiques contre les violences. Elle a souligné la nécessité de continuer à aborder toutes les formes de violences de genre pour garantir le développement humain.

Ana Falú, Directrice Exécutive de CISCSA et Conseillère Ubuntu de CGLU, a encouragé les participantes à célébrer les progrès accomplis tout en approfondissant et en protégeant l’agenda féministe conquis jusqu’ici.

Points clés partagés par les participantes :

  • Garantir l’égalité pour les femmes fonctionnaires locales qui portent des politiques publiques égalitaires.

  • Renforcer les partenariats avec la société civile et les réseaux internationaux de femmes.

  • Allouer davantage de ressources et garantir l’autonomie financière des initiatives locales.

  • Sensibiliser les générations futures pour qu’elles connaissent leurs droits dès leur plus jeune âge.

  • Réaffirmer le rôle clé des gouvernements locaux et régionaux dans l’élimination de la violence de genre.

Le programme « Pour des territoires protecteurs des femmes victimes de violences » a jeté les bases d’un changement global, comme l’a souligné Emilia Saiz. Depuis la création d’observatoires jusqu’à l’autonomisation économique des femmes, les initiatives locales sont essentielles pour combattre les violence à l'égard des femmes. Ce séminaire a démontré que les gouvernements locaux, en collaboration avec la société civile et les réseaux mondiaux, ont le pouvoir de transformer les réalités et de construire un avenir plus égalitaire.

La lutte continue, et comme cela a été proclamé lors du séminaire : « Vives nous voulons, pas une de plus ! »

Découvrez les photos du séminaire final !