03/12/2025

Les Gouvernements locaux au cœur de la localisation des droits humains : les points saillants de la réunion HCDH–CGLU

Le 26 novembre, des gouvernements locaux et régionaux, des experts des Nations Unies et des représentants de la société civile se sont réunis pour une réunion sur le gouvernement local et les droits humains, convoquée par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), en collaboration avec Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU), la Geneva Human Rights Platform, l’Institut Raoul Wallenberg des droits de l’homme et du droit humanitaire (RWI) et la Mission permanente de la République de Corée à Genève. La réunion a examiné la manière dont les villes et territoires du monde entier font progresser les droits humains au niveau local et a mis en lumière le Cadre d’orientation pour la création d’une Ville des droits humains, co-développé par le HCDH et CGLU.

Les gouvernements locaux et l’action en matière de droits humains

S.E. M. Seong Deok Yun, Ambassadeur et Représentant permanent de la République de Corée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, a ouvert la séance en soulignant le rôle essentiel du Cadre d’orientation pour la création d’une Ville des droits humains du HCDH–CGLU dans l’autonomisation des gouvernements locaux en tant qu’acteurs clés de la localisation des droits humains. Il a souligné l’importance de politiques adaptées au contexte local pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) et la nécessité d’impliquer pleinement les gouvernements locaux dans leur mise en œuvre.

La Secrétaire générale de CGLU, Emilia Saiz, a rappelé que les gouvernements locaux et régionaux sont en première ligne dans la réalisation des droits humains, notamment par la fourniture de services publics. Elle a toutefois souligné la nécessité d’un engagement multilatéral mieux structuré : « Il est important de placer les droits humains au cœur de notre agenda, mais aussi d’assurer la connexion entre les droits humains et d’autres agendas multilatéraux. Mettre le service public au centre transformera notre capacité à mettre en œuvre les droits humains. »

Peggy Hicks, Directrice de la Division des thèmes et des procédures spéciales du HCDH, a insisté sur l’urgence de renforcer les villes et territoires face à des défis mondiaux croissants — de la famine aux inégalités en passant par le changement climatique. « Les gouvernements locaux sont plus proches des populations qu’ils servent », a-t-elle rappelé, soulignant leur capacité d’innovation et de réponse aux besoins locaux. Elle a averti qu’en période de recul démocratique, les droits humains doivent rester une obligation partagée et non un choix.

Leçons tirées des villes de droits humains établies et émergentes

La Session 1 a mis en avant des pratiques prometteuses et des leçons issues de l’adoption d’une approche fondée sur les droits humains dans la gouvernance locale et la prestation de services publics, en s’appuyant sur l’expérience des Villes des droits humains et du Cadre d’orientation HCDH–CGLU.

Shams Asadi, Commissaire aux droits humains de Vienne, a présenté le parcours de plus de dix ans de la ville en tant que Ville des droits humains et l’essor du mouvement mondial. Elle a insisté sur l’importance de l’engagement politique, soutenu par des outils structurels tels que du personnel dédié, la budgétisation fondée sur les droits humains et la création d’une « culture des droits humains » au niveau des districts. Elle a souligné le lien essentiel entre démocratie et droits humains : « Pour réunir démocratie et droits humains, la solution est l’approche fondée sur les droits, avec une participation et une transparence véritables. À un moment où l’espace civique se réduit, la confiance dans les institutions diminue également. »

Pannarai Chingchitr, Directeur général adjoint au Département de la stratégie et de l’évaluation, a présenté la feuille de route à neuf priorités de Bangkok, rappelant qu’une ville n’est véritablement vivable que si les droits humains y occupent une place centrale. Le gouvernement métropolitain de Bangkok s’est officiellement engagé à devenir une Ville des droits humains, en créant un comité dédié et des programmes de formation pour intégrer les droits humains dans ses opérations. Il a toutefois rappelé que ce processus est de long terme : « Nous révisons actuellement nos opérations pour élaborer un plan solide. Nous devons favoriser un changement organisationnel pour construire une ville réellement vivable pour toutes et tous. »

Depuis Gdansk, Katarzyna Ziemann a présenté le modèle d’égalité de traitement de la ville, axé sur les services destinés aux groupes vulnérables, comprenant notamment un centre d’égalité de traitement et des campagnes de sensibilisation. Elle a présenté quatre engagements structurants :

  • Faire de la ville un lieu où chacun s’engage à respecter les normes des droits humains ;

  • Renforcer la protection et la réalisation de tous les droits — économiques, civils, politiques et sociaux ;

  • Construire une Ville des droits humains sur une nouvelle vision de la ville, au-delà de la simple non-discrimination ;
    Faire de la Ville des droits humains une vision collective et co-créée, plutôt qu’un simple label.


Le Prof. Gyonggu Shin, Directeur exécutif du Centre international de Gwangju, a rappelé le rôle pionnier de la ville, qui a adopté la première charte asiatique des droits humains au niveau local et mis en place des institutions telles qu’un médiateur et un indice d’auto-évaluation des droits humains.

Morten Kjaerum, professeur et ancien directeur du RWI, a souligné l’importance de relier la recherche académique à l’expérience des gouvernements locaux, notamment dans le cadre du projet RIGHTSCITIES. Il a salué l’émergence d’un réseau informel de partenaires œuvrant à la localisation des droits humains, piloté par CGLU : « Nous devons identifier ce qui existe déjà et déterminer ce qui manque. »

Lors du débat ouvert, Adrià Duarte, coordinateur de la Commission de CGLU sur l’inclusion sociale, la démocratie participative et les droits humains, a réaffirmé l’engagement de CGLU envers le mouvement des Villes des droits humains, notamment à travers la campagne des 16 jours d’activisme, la révision de la Charte-Agenda Mondiale des Droits Humains dans la Ville et la campagne mondiale “10, 100, 1 000 villes et territoires des droits humains pour 2030”. Il a également insisté sur la nécessité de passer à la phase d’application du Cadre d’orientation.

La Session 2 a réuni des représentants de New York, Mexico, Wallonie-Bruxelles et des Nations Unies — dont Balakrishnan Rajagopal, Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à un logement convenable — qui ont présenté des pratiques innovantes pour renforcer l’engagement des gouvernements locaux et régionaux dans les mécanismes onusiens des droits humains.

Perspectives d’avenir

Il y a dix ans à peine, un tel débat sur les Villes des droits humains au sein de l’ONU aurait été impensable. Alors que le mouvement gagne en reconnaissance et que les villes s’imposent comme des acteurs essentiels de la protection et de la mise en œuvre des droits humains, les participants ont rappelé que beaucoup reste à faire. Renforcer le mouvement — à travers la campagne mondiale “10, 100, 1 000 villes et territoires des droits humains pour 2030”, la Charte-Agenda et la mise en œuvre du Cadre d’orientation — sera essentiel pour passer des engagements à l’action.

Les participants ont mis en avant la nécessité de :

  • Renouveler l’engagement politique face aux reculs observés ;

  • Définir des normes minimales et un système d’accréditation pour les Villes des droits humains ;

  • Garantir la participation effective des gouvernements locaux et régionaux aux mécanismes de l’ONU ;

  • Renforcer la culture des droits humains au niveau local ;

  • Intégrer l’approche fondée sur les droits dans toutes les politiques et services municipaux ;

  • Encourager la coopération internationale et le partage de bonnes pratiques.

La réunion s’est conclue sur un engagement partagé à faire progresser le mouvement mondial des Villes des droits humains, afin que les villes demeurent à l’avant-garde de la protection, de la promotion et de la localisation des droits humains.