La protection des migrants se pose comme un enjeu important pour les collectivités locales en ces temps de pandémie: communiquer sur la crise et les mesures sanitaires, assurer un accès à la santé et à l’alimentation pour tous, coordonner les actions au niveau local avec les associations et faire remonter l’urgence de la situation des migrants aux différentes échelles de l’Etat... L'une des dernières expériences d'apprentissage #BeyondTheOutbreak organisées par CGLU et le projet MC2CM a abordé ces questions, mettant d’une part en lumière les réponses et difficultés pour faire face à ces besoins et soulignant d’autre part, l’émergence de logiques de solidarités sans précédent.
Cette expérience d'apprentissage a compté sur la participation de plusieurs pouvoirs locaux membres du projet MC2CM et de la CISDPDH, tels que Sfax ou Sousse (Tunisie), ainsi que des gouvernements locaux engagés dans la défense des droits humains comme Grenoble (France), Lampedusa (Italie) ou Quito (Equateur). Le partage des politiques et initiatives mises en place par les gouvernements locaux sur ces questions ont montré différents points d’entrée pour élaborer des réponses face aux besoins des migrants: comment protéger les résidents migrants en situation de vulnérabilité, sur les questions de santé, d’alimentation, de logement ou de travail, souvent liées à l’enjeu de l’informalité?
La ville de Sfax a partagé son étroite collaboration avec les associations locales et les partenaires internationaux pour fournir aux migrants des paniers alimentaires, ouvrir des cagnottes solidaires ou encore ouvrir l’accès aux soins pour les migrants. Les villes de Grenoble, Al Hoceima et Rabat ont trouvé des moyens de fournir un hébergement d'urgence aux personnes migrantes, notamment grâce à des accords avec des hôtels ou des structures publiques pour garantir les mesures de confinement dans des conditions les plus dignes possibles. Lampedusa a également saisi cette occasion pour sensibiliser sur la nécessité de lutter contre le racisme; montrant que les collectivités locales préalablement engagées sur la protection des droits ont déjà les outils nécessaires pour permettre le dialogue social, la communication ou la participation.
En ce sens, le maire de Grenoble, M.Eric Piolle, a rappelé la nécessité que les migrants puissent se sentir appartenir à la communauté locale et inclus dans les logiques de solidarités sociales qui émergent en ces temps de pandémie. Les gouvernements locaux ont également été sensibles à la nécessité de s'attaquer aux obstacles liés à la communication et à l’information avec les personnes migrantes, de gagner leur confiance et de disposer des données adéquates sur leurs situations pour apporter des réponses efficaces à cet égard. Dans de nombreux cas, la coordination entre les différents niveaux de collectivités territoriales mais aussi avec l’Etat, est apparu comme un facteur clé du succès des réponses à apporter.
Enfin, comme l’a rappelé la conseillère municipale de Quito, Mme Gissela Chalá, la crise du COVID-19 « montre la valeur des services publics et l’importance de renforcer l’institutionnalité des mesures relatives aux droits humains », soulignant ainsi la nécessité d’aller au-delà des initiatives de solidarité liée à l’urgence pour favoriser l'institutionnalisation de ces différentes expérience grâce à une approche fondée sur les droits. Le maire d’Al Hoceima et président de CGLU, Mohamed Boudra, a appelé les gouvernements locaux à que cette crise soit le tremplin d’une nouvelle approche pour l’inclusion des migrants, fondés sur la solidarité et les droits. L’importance du plaidoyer au niveau national et international ainsi que le travail en réseau entre les collectivités locales ont largement été soutenus par les participants. Toutes ces initiatives ont été considérées comme essentielles pour garantir à la fois le succès des mesures de quarantaine et garantir que les villes restent des espaces d’opportunité, inclusifs, participatifs et ouverts.
La session a également ouvert la discussion avec les partenaires internationaux (ONU Habitat, ICMPD) et avec des organisations de la société civile comme le Conseil grec des réfugiés; dont le représentant, M.Spyros Oikonomous, a appelé les participants à « regarder comment les gens s'auto-organisent au sein des communautés pour faire face à l'impact du COVID-19, palliant parfois le manque d'assistance des autorités publiques, mais aussi à écouter ce qu'ils ont à dire et les inclure dans les discussions sur l'élaboration des politiques de réponse », soulignant ainsi l’importance du dialogue société civile-collectivités locales pour surmonter ensemble cette crise par l'action collective.